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Questions de crayons

Bonjour Madame Santha,

 

Je suis directrice adjointe dans un CPE de l’ile de Montréal. Il y a quelques années, une éducatrice a suivi une formation dans laquelle la formatrice parlait de l’apprentissage de l’écriture. Elle avait suggéré de ne pas offrir en tout temps les gros crayons-feutres (type Crayola) et les grosses craies de cire chez les plus petits. Selon elle, les enfants pouvaient les utiliser à l’occasion, mais elle proposait de présenter en tout temps uniquement des crayons de la même taille que les crayons utilisés pour l’écriture. 

 

Je recherche maintenant l’avis d’une ergothérapeute afin de valider si nous fonctionnons correctement ou si nous devons apporter des modifications à notre façon de faire.

 

Si vous avez besoin d’informations supplémentaires, vous pouvez communiquer avec moi par courriel ou à mon bureau directement.

 

Merci de votre collaboration!

 

Josée

 


 

Bonjour Josée,

 

Merci pour cette question intéressante.

 

J’aimerais beaucoup vous répondre avec une règle claire telle que « de petits crayons pour de petites mains », mais malheureusement, l’histoire n’est pas si simple!

 

En premier lieu, il est vrai de penser que le type de crayon influencera directement la préhension de celui-ci par l’enfant et que la prise aura un impact sur la précision du geste graphique.

 

Toutefois, pour que l’apprentissage de l’écriture soit agréable pour l’enfant (et l’adulte!) lorsqu’il sera rendu au primaire, la clé ne réside pas uniquement dans la fréquence d’exposition aux crayons à mine réguliers, mais plutôt dans l’atteinte d’une maturité neurologique suffisante qui s’acquiert à travers le développement de certaines habiletés motrices et cognitives telles que : 

  1. La conscience corporelle et les relations spatiales;
    1. Le contrôle postural et le développement de la dominance;
    2. La dissociation articulaire (de l’épaule jusqu’au bout des doigts) et la coordination oeil-main.

L’apprentissage de l’écriture devient alors une finalité développementale qui s’automatisera facilement à partir de la première année si l’enfant a eu suffisamment d’opportunités pour développer les habiletés prérequises.

 

En principe, il serait toujours bon de se questionner sur les caractéristiques des crayons, l’objectif de l’activité et le développement de la motricité fine de l’enfant afin d’assortir le tout.  Lorsque l’on se trouve seule avec l’enfant, cela est possible et profitable. En groupe, mon conseil serait d’assortir le choix du crayon avec le but de l’activité. Ainsi, dans un contexte de développement progressif, il peut être judicieux de présenter aux enfants un seul type de crayon à la fois pour chaque type de projet/d’activité.

 

Pour vous aider à sélectionner le type de crayon en fonction de divers projets tout au long de l’année, voici quelques considérations importantes :                

 

Concernant les gros crayons-feutresQuestions de crayons-1

  1. Ils sont plus faciles à tenir. Ils sont idéals pour les jeunes enfants qui utilisent encore une prise palmaire impliquant toute la main.
  2. Ils demandent moins de coordination et de force pour produire une trace sur le papier, ce qui est très renforçateur pour les enfants qui sont en train de développer leur intérêt pour les activités papier-crayon.
  3. Les gros crayons-feutres ont un bouchon qui est propice à être retiré par la main dominante. Cela incite l’enfant à dessiner avec sa main non dominante si sa préférence manuelle n’est pas encore bien établie et qu’il ne change pas de main. Ceci peut nuire au développement de la dominance chez certains enfants si, en groupe, on n’a pas l’opportunité de rester vigilante et de les inciter à transférer le crayon dans leur main dominante.
  4. Puisqu’il y a un espace pour insérer le bouchon sur le bout du crayon, ils demandent à ce que la prise du crayon soit forcément plus haute que l’endroit optimal. Pour un enfant qui utilise une prise du crayon mature à 3 doigts, ceci est moins économique sur le plan musculaire et exige l’implication des muscles de la paume de la main en plus des muscles des doigts. Au bout du compte, l’utilisation prolongée peut décourager les petites mains moins endurantes.
  5. Ils augmentent l’effort de coordination motrice nécessaire pour avoir de la précision. Ils promeuvent une grosse écriture et peu la production de petites lettres bien formées. Ils ne sont donc pas idéals selon moi pour la préécriture.
  6. En somme, ils sont idéals quand l’objectif est la créativité et moins pour les activités graphiques plus précises.

Concernant les petits crayons (ayant un petit diamètre et courts, ex.Questions de crayons-2 golf)

  1. Ils promeuvent une prise mature du crayon (prise avec 3 doigts) pour les mains qui sont prêtes, car ils sont difficiles à saisir avec une prise palmaire ou de transition.
  2. Ils sont idéals pour le  traçage, les dessins plus petits et plus précis ainsi que pour l’écriture des lettres.
  3. Parce qu’ils sont plus courts, ils sont nécessairement plus légers. Ainsi, on favorise une utilisation prolongée du crayon plus confortable pour les activités plus longues.
  4. En somme, ils sont idéals pour les petites mains en train de bâtir leur endurance et en apprentissage de l’écriture.

Concernant les crayons à mine réguliers HB neufs ou de couleur du même diamètre et de la même longueur Questions de crayons-3

  1. Ils favorisent les tracés de précision lorsque la préhension mature du crayon est possible.
  2. Plus ils sont longs, plus leur contrepoids alourdira l’outil. Ils peuvent ainsi être lourds pour les petites mains d’enfants âgés entre 3 et 4 ans et promouvoir une mauvaise prise du crayon (l’enfant doit recruter de plus gros ou davantage de muscles pour mobiliser le crayon). Ils peuvent donc mettre en place de mauvaises habitudes qui seront difficiles à contrer plus tard.
  3. Ils fonctionnent moins bien lorsqu’ils ne sont pas aiguisés ou que leur mine brise. Il est ainsi préférable d’attendre que les enfants maitrisent l’utilisation de l’aiguisoir avant d’offrir ce type de crayon aux enfants lors des activités libres. Ceci dit, une fois maitrisé, l’aiguisage est une excellente activité pour stimuler la dissociation au poignet et la coordination des deux mains.
  4. En somme, je recommanderais davantage ces types de crayons après l’entrée à l’école et, idéalement, à partir de la 1re année.

Concernant les crayons de cireQuestions de crayons-4

  1. En ce qui concerne leur longueur et leur diamètre, ils partageront les mêmes considérations que pour les crayons à mine/de couleur.
  2. Avec les crayons de cire, il faut appuyer fort, particulièrement lorsqu’on utilise des crayons de moins bonne qualité. Ils ne sont donc pas idéals pour les enfants qui n’ont pas encore compris ce principe et qui sont peu renforcés par leurs tracés lorsque ceux-ci sont très pâles.
  3. Toutefois, avec la génération des tablettes tactiles, il faut promouvoir l’utilisation de matériel résistant qui permet aux enfants de vivre davantage de sensations proprioceptives dans le geste graphique (plutôt que visuel). Cela facilitera l’acquisition de la fluidité et du contrôle moteur plus tard.
  4. En somme, il semble que les crayons de cire font peut-être partie d’une génération précédente qui a cédé sa place aux gros crayons-feutres chez les plus jeunes.

Concernant les bouts de crayons de cire (gros ou petits) ou les craies à tableau de la même dimensionQuestions de crayons-5

  1. Ils favorisent le développement de la prise mature du crayon.
  2. Ils permettent peu de précision et ils ne sont pas pratiques pour le coloriage, le traçage, le dessin de formes ou d’images ou l’écriture de lettres.
  3. Ils sont idéals pour les dessins libres sur de grandes surfaces. Ils promeuvent des mouvements d’une grande amplitude ce qui aide à développer la stabilité de l’épaule nécessaire à l’écriture.
  4. Selon mon expérience, ils suscitent moins d’intérêt chez les enfants, car ils ont l’air vieux ou brisés s’ils sont présentés en compétition avec d’autres types de crayons.
  5. En somme, les petits bouts sont intéressants en pensant au développement, mais il faut en faire l’objectif et ne sortir que de petits bouts lorsqu’on s’y affaire.

En conclusion, si votre intention est de favoriser le développement de la préécriture chez les enfants âgés entre 4 et 5 ans, je vous suggère d’opter pour des projets/activités graphiques qui permettront une transition graduelle vers l’utilisation d’un crayon à mine de longueur « golf » vers la fin de l’année.

 

Josiane Caron Santha, ergothérapeute


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Auteur

Josiane Caron SanthaJosiane Caron Santha

Diplômée d'une maîtrise en ergothérapie et ergothérapeute depuis 1998, Josiane Caron Santha est propriétaire d'Ergothérapie Les Mille-Pattes, une clinique pour enfants renommée pour ses services en ergothérapie et en autisme. Josiane compte également diverses expériences à titre d'auteure et de formatrice. Elle a récemment publié 'L'apprentissage du découpage chez l'enfant'.



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